• <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>

    Ce matin j'étais moins angoissée que la dernière fois que je suis allée en prison mais le cœur n'y était pas. En arrivant devant la prison, je me suis assise sous le manguier en attendant le padre. Je me suis demandé ce qui me motivait à venir ici tous les samedi. Pourquoi m'infliger ça ? N'étais t-il pas mieux d'ignorer leur souffrance que de m'y confronter toutes les semaine ? Je n'ai pas eu le temps de répondre à ces questions, le padre est arrivée et nous avons plongé dans l'enfer carcéral de la prison centrale.

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    Barka n'était pas dans le couloir des prévenus, il avait été remplacé. Provisoirement, définitivement, impossible de poser la question.

    Comme toujours nous avons commencé par la P6. La puanteur et la chaleur étaient difficilement supportables. Pas de bonjour, même pas un regard. J'ai cherché des gens à soigner, je me suis agenouiléle pour discuter. Je n'étais pas motivée mais je me suis forcée. J'avais envie d'être dans un champ au printemps, sentir le vent sur ma peau et l'odeur des narcisses. Un jeune homme m'a appelé, il voulait à mangé, de l'argent ou au moins un paracétamol. Je lui ai expliqué que je n'étais pas là pour ça, je vienais soigner les blessés, faire les signalements aux autres ONG. « Si tu ne peux rien pour moi, alors pars ! »

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    J'ai encaissé, son voisin surenchérit : « Il ne faut pas venir quand on ne peut rien ». J'ai rejoint le père Roberto, j'étais sonnée. Il s'occupait du doigt d'un prisonnier.

    -Tu vois, l'os sort. Qu'est ce que tu en penses ?

    -Faites voir.

    Le pauvre malheureux avait l'auriculaire éclaté et l'os sortait et pendait.

    -Je ne sais pas. Je vais désinfecter, je vous appellerai si j'ai besoin d'aide.

    Cette plaie était au dessus de mes compétences, j'ai appelée Ana et Marie.

    -L'os sort et pend, le doigt est complètement explosé. La plaie commence déjà à puer.

    -Il faut l'hospitaliser lui remettre l'os ou l'amputer.

    -Ils ne l'hospitaliseront pas, nous seront les seuls à intervenir. Qu'est-ce que je fait.

    -Il faut une intervention chirurgicale.

    -Et si je lui enlève l'os ?

    -S'il est déjà détacher, ça peut limiter l'infection.

    -Merci

    -Courage, à tout à l'heure.

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    J'ai raccroché et je lui ai donné deux paracétamols

    -Alors ?

    -On tente d'enlever l'os.

    -Tu rigoles ?

    -J'ai vraiment l'air de rigoler ? On tire et si ça vient on enlèvera l'os. Dans le cas contraire je ne ferais que désinfecter.

    -Dès que tu as mal, tu nous préviens et on arrêtera.

    -D'accord Padre.

    -Tu es prête ?

    -On y va, donnez moi la pince cocher.

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    L'os était encore bien accroché au doigt, j'ai bien désinfecté, bandé et nous avons changé de cale.

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    En fait, à cause du plan de nutrition ceux de la P6 ont été pour la plus part libérés et les autres ont été transférés dans la P7. Enfin des têtes connues qui savent que je ne peux rien pour eux. Abdoulaye et son crâne fendus étaient là aussi. La plaie du crâne était totalement guérie et il toujours aussi limité mais il n'a plus de crises de démence. Il voulait du paracétamol mais c'était le Padre qui l'avait, je lui ai demandé d'attendre.

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    Les sexes des détenus de cette cale sont presque tous rongés par une drôle de maladie que je ne connais pas. Suite à un don j'avais de l'éosine aqueuse dans mon sac, le produit idéal pour ce genre de plaies. Nous avons commencé à les badigeonner et puis l'un d'eux est arrivé avec de grosses plaies non seulement sur le sexe mais aussi l'intérieur des cuisses. J'étais à côté  des latrines et l'odeur acre m'envahissait. J'avais du mal à me concentrer, j'avais envie de vomir et comme seule vision un sexe vérolé. Je me suis concentrée pour finir, un champ au printemps, le vent sur ma peau et l'odeur des narcisses. Le père, lui était imperturbable. Il oeuvrait, soignant les sexes et les abcès aux fesses. Abdoulaye à continuer à insister pour son paracétamol, je lui ai dit que je m'occuperai de lui plus tard et soudain il m'a attrapé le bras droit et m'a attiré à lui pour que je m'occupe de lui.

    -Aie !! Abdoulaye, tu me fais mal !

    -Lâche la !!! Lâche la tout de suite !!!

    -Adoulaye, lâche moi !!!

    -Tu t'arrête tout suite, lâche la !!

    -Abdoulaye, siga place, mametti n'fafe (Abdoulaye, va à ta place, attends moi j'arrive)

    -Ca va, il ne t'a pas fait trop mal.

    -Je survivrai mais je crois que je vais encore avoir mal à l'épaule pendant quelques jours de plus. J'ai eu un peu peur.

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    Puis le père est allé s'assoire à côté d'un jeune homme pour lui demander des nouvelles de son cousin. Je ne leur ai jamais parlé mais le père va les voir chaque semaine et s'enquière de leurs santés. Il leur remonte le moral. On les appelle les cousins de Katako, en juillet dernier ils ont assassiné de sang froid leur maître d'école, un bénédictin, un ami du père Roberto.

    Comment cet homme peut toute les semaines remonter le moral des assassins de mon ami ? Il me dit que c'est normal, ce n'est pas à lui de juger ce genre de chose et que ce sont des être humains avant tout.  C'est vrai mais j'admire quand même son geste.

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    Et enfin nous sommes passés à la cale malade. Il y avait le docteur Issiaga parce qu'il y avait eu un mort pendant la nuit.

    -Tu ne vas pas le voir, tu en vois suffisamment comme ça.

    -Vous savez, ce n'est pas le premier mort que je verrai.

    -Et bien justement. J'irais prier pour lui, tu restes ici.

    Je crois que le père à lui aussi peur que je ne revienne plus, il est devenu une véritable mère poule pour moi.

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    Comme globalement leur état sanitaire s'améliore, sauf pour les morts, nous avons moins de soins à faire et plus de temps à leur consacrer pour discuter. Mais les conversations tournent invariablement autours de ce que nous ne voulons pas fournir : l'argent. « Si tu ne nous aide pas rentre chez toi ! »

    Les mots étaient lâchés pour la troisième fois de la journée. Il était temps de partir avant que je prenne la décision de ne plus jamais revenir.

    -Roberto, Andiamo ?

    -Si.  

    Nous utilisons l'italien pour les impératifs ou pour que les autres ne comprenne pas. Il a compris que cela signifiait un départ immédiat et nous sommes enfin sortis.

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    En sortant de la prison j'ai rejoint Marie qui se baladait en ville avec Victorine et Labombo. Nous avons mangé un kebab et nous sommes allées à la messe à saint André. Après la messe, débriefing avec le père.

    -Je ne suis plus dedans, je suis en train de lâcher la prison. Je n'arrive plus à y aller comme avant.

    -Pourquoi ? Parce que les prisonniers sont maigres, parce qu'ils te sollicitent pour de l'argent, parce qu'ils sont galeux, parce qu'ils ne sont pas sympa. Ca a toujours été le cas mais dis toi que tu supportes ça deux heures par semaine et que eux le supportent tout le temps.

    -Parce que j'ai eu peur et que je ne suis pas une sainte comme vous. Des fois, je flanche.

    -Tu flanches et tu ne penses pas à eux

    -1 c'est méchant comme remarque, 2 vous savez que c'est faux.

    -Tu as raison, c'était méchant et faux mais si tu ne viens plus, je serai tout seul. Tu vois, moi non plus je ne suis pas un saint.

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    Il était temps que je rentre à la maison, j'étais épuisée. Il faut que je trouve un second souffle pour la prison.


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  • Au cours de notre discussion animée de la veille le père Roberto m'avait donné un conseil très avisé. Un conseil issu de sa propre expérience de chasse à la corruption dans sa paroisse. Quand il y a un circuit cherche quelles sont les personnes qui sont à deux endroits du circuit en même temps.

    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>

    C'est avec ce conseil de je suis partie travaillée ce matin. Comme je serai en congé demain et que j'avais beaucoup de boulot, je n'avais pas l'intention de partir en chasse même si la situation me pesait.

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    Quand j'ai vu Dalassou, le brave Dalassou à la fenêtre de la pharmacie à une heure à laquelle il ne doit pas être, puisqu'il travail à la nutrition, j'ai été interpellée.

    Je n'avais pas le temps de m'en occuper parce que je partais à la nutrition pour faire le stock. Mais quand je suis arrivée à la nutrition j'ai vu Dalassou regagner son poste et sortir un carnet plein de médicaments de sa poche et le remettre à un patient.

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    -Dalassou !!!!

    -Oui ?

    -Donnes moi ce carnet et suit moi. Monsieur suivez moi aussi.

    Quand Dalassou lui a parlé en dialecte, je lui ai interdit de parler. J'ai emmené le patient dans le bureau de la direction et j'ai demandé à Dalassou d'aller chercher Ana.

    Le patient nous a balancé tout le circuit. Dalassou rabat les malades sur Daniel qui fait une consultation sans ticket. Après payement de la main à la main, Dalassou emmène le carnet jusqu'à la pharmacie où il est servit par Jeanne et Dalassou ramène le carnet à la nutrition où il remet le carnet et les médicaments au patient. L'argent est alors partagé entre Dalassou, Daniel et Jeanne. Le patient paît 12 000Frs alors que la consultation est à 10 000Frs et le dispensaire ne perçoit rien.

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    Ce n'est pas eux que je voulais avoir. Dalassou il rembourse un important prêt qu'il a contracté pour l'enterrement de son fils au mois de décembre. L'enfant  de dix-huit mois était tombé dans une fausse sceptique, nous étions tous à l'enterrement.

    Jeanne, j'ai accepté de la prendre à la pharmacie parce qu'elle est séropositive et qu'elle ne peut plus travailler à la maternité.

    La femme de Daniel est en train de mourir d'un cancer du sein parce qu'il n'y a pas de chimiothérapie dans ce pays. La plus part avaient déjà un avertissement pour malhonnêteté, ils seront licenciés parce que nous ne pouvons pas accepter ça.

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    Accablée parce qu'il allait falloir prendre des sanctions, je suis retournée à pharmacie et c'était Mariama qui était à la fenêtre. Elle non plus n'avait rien à y faire. Je me suis postée dans la cour et je me suis donnée une minute d'observation avant d'aller faire le stock de la maternité. En moins de trente seconde j'ai vu un homme donner un lot de carnets sans tickets à Mariama et Mariama les donner à Jeanne. J'ai intercepté les carnets, j'ai appelé les patientes et je les ai convoquée dans mon bureau. Quatre nouvelles dépositions impliquant un gardien, un médecin, une infirmière, Mariama et Jeanne. Cette fois-ci, non seulement le dispensaire était volé puisque l'argent n'allait pas dans nos caisses mais en plus ces pauvres femmes avaient payée le double du prix de la consultation, 10 500Frs au lieu de 4 000Frs

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    Quand je suis sortie du bureau, il y avait l'infirmière qui m'attendait pour me donner des explications sur la situation. A côté d'elle il y avait une femme que j'avais rencontrée mardi. Une réfugiée libérienne qui mariée avec un sierra-léonnais dans un camp de réfugié de l'est du pays. Son fils de deux ans a les deux pieds bots. Elle a fait tout le voyage jusqu'au dispensaire, 1000 Km, pour son autre fils de huit ans qui avait une bronchite. J'avais passé un coup de téléphone à Terre des hommes pour qu'ils tentent de faire opérer l'enfant aux pieds bots en suisse. Elle venait me dire qu'elle avait eu un rendez-vous avec le médecin de TDH et que le dossier était en cours.

    Ca m'a fait du bien de la voir, l'infirmière insistait et comme j'ai sentit que je ne m'en débarrasserai pas je l'ai laissé parler. Elle était au bord de l'hystérie.

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    -Il faut que je te parle absolument, tu as mal compris pour les carnets

    -Tu vois, c'est pour elle que je suis là. Pour aider les gens comme elle pas pour jouer au gendarme et aux voleurs.

    -Quoi ?

    -Rien

    -Tu as mal compris pour les carnets, il y avait les tickets mais les tickets sont tombés et c'est pour ça que tu ne les as pas vu. C'est la faute des patients, ils n'ont pas fait attention mais je t'assure, il y avait les tickets. C'est parce qu'ils sont tombés.

    -Joséphine !

    -Oui ?

    -Je te rassure, les tickets ils n'ont jamais était dans ces carnets.

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    Je crois qu'elle n'a pas compris que j'ironisais parce qu'elle est partie plutôt contente de la conversation et carrément moins hystérique.

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    Comme je n'avais pas eu le temps de servir la dotation de la nutrition j'avais demandé à Felix de le faire.

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    -Awa m'a dit de sortir trois sacs.

    -Trois sacs pour un jeudi, c'est un peu beaucoup.

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    -Awa, je peux savoir pourquoi tu as fait sortir trois sacs à Felix ?

    -...

    -Allez, on remballe le sac et le bidon d'huile.

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    Quand j'ai raconté ça au comptable il m'a expliqué qu'en ce moment le service nutrition faisait payer les sachets de CSB offert par le PAM (Programme Alimentaire Mondial) et destinés aux enfants malnutris sévère. 5 000Frs le sac, une fortune pour celle qui n'ont pas de quoi nourrir leurs enfants.

    « Je m'en occuperai un autre jour. Sept licenciements pour aujourd'hui ça suffira ». Et puis Awa c'est elle qui me remonte le moral quand j'ai des coups de cafard. Je m'en occuperai lundi.

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    Après le stock de la maternité, quand tout le monde est partit il me restait à faire le stock de la consultation prénatale, je me suis endormie sur la table  au milieu des cornets de médicaments.

    Ce n'est pas facile de faire respecter la loi dans un pays ou le mauvais exemple a été donné par le chef de l'état en personne.


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  • Tout à l'heure Rose et Nathalie sont venues se plaindre de l'ambiance du dispensaire. Elles ne supportent plus mes magouilles de leurs collègues, elles veulent que ça cesse.

    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>

    Quand on sait à quel point Rose et Nathalie magouillent, ça nous donne une idée de l'ampleur du problème. Nous sommes accablées, nous les surveillons toute la journée comme le lait sur le feu. Nous avons mis en place des systèmes de contrôles et de surveillance mais ils continuent. Nous avons essayé de les responsabiliser, nous leur payons des primes pour les inciter à être honnêtes. Rien y fait, j'ai même l'impression que ça augmente.

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    Nous sommes découragées. En sortant du dispensaire Marie à dit : « Là, maintenant, tout de suite, j'ai envie de rentrer chez moi et de les laisser à leur corruption. »

    Elle n'était pas seule à vouloir entrer chez elle. A quoi bon !

    Notre présence ne sert à rien, ils se jouent de nous.

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    Comme c'était le mercredi des cendres nous sommes allées à messe. Pendant que nous attendions religieusement notre tour pour l'apposition des cendres nous avons entendu crier au fond de l'église. « Mama », c'était Mohamed Lamine qui s'est jeté dans mes bras. Comme d'habitude il a finit la messe endormi sur mes genoux. 0 la fin de la messe son oncle m'a expliqué qu'il avait beaucoup pleuré la veille parce que je n'étais pas venue depuis une semaine. Quand je suis partie, il a recommencé à pleurer. Assis sur les marches de l'église il a repoussé son oncle qui voulait le consoler.

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    Comme c'était mercredi je suis restée avec le père Roberto pour discuter. Je lui ai dit que j'étais découragée et que ça ne servait à rien que je me sacrifie pour rien. Je refuse de me sacrifier pour des gens qui laissent mourir les enfants sur les paillasses et d'autres qui rackettent les plus pauvres.

    -Et vous n'êtes jamais découragé vous.

    -La seule fois où j'ai vraiment été découragé, c'est le jour où j'ai découvert que mes prêtres étaient menteurs, voleurs et que je n'y pouvais rien. Ce jour là moi aussi, j'ai eu envie de rentrer chez moi.

    -Je crois que le plus difficile c'est que ce soit nos plus proches collaborateurs, on se sent trahi par ceux en qui on a le plus confiance. Comment vous faîtes maintenant pour travailler avec eux ?

    -Je travaille tout seul.

    -Vous croyez qu'il y a de l'espoir pour ce pays ?

    -Oui, regarde Mohamed Lamine. Pour une raison que j'ignore il est très attaché à toi. A chaque fois que j'arrive à Saint André il me demande : « Mama ? Mama ? » Quand il a pleuré tout a l'heure, c'était de véritables larmes parce qu'il était sincèrement triste que tu partes. Un enfant, c'est toujours un espoir. Et puis, je suis là moi aussi.

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    Un vieux curé et un enfant d'à peine cinq ans, voici mes deux remparts contre le découragement de la corruption.


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  • Le nonce apostolique et son secrétaire sont venus dire la messe et manger chez nous.

    Quand j'ai dit à Bob le gardien que l'ambassadeur du pape viendrait à la maison il a fait de grands yeux. « Oh !! Il faut faire une jolie maison alors. »

    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>

    Heureusement que Bob a dit ça. J'avais totalement oublié que la vaisselle de messe n'avait pas était nettoyée  et que le linge de messe n'avait pas était repassé. Mais repasser sans électricité c'est toute une affaire. Avec Bob nous avons allumé le fer à charbon et comme au siècle dernier j'ai repassé avec un fer charbon. Ca m'a pris plus d'une heure, une expérience inoubliable. Sachez que c'est plus agréable qu'un fer électrique parce qu'il n'y a pas de fil qui s'entortille partout.

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    Un évêque et un prêtre pour nous quatre dans notre petite chapelle, c'était vraiment la classe. Quatre, parce qu'Hélène est venu passer la soirée avec nous. Comme d'habitude il y a eu un peu de flottement au moment de la prière universelle mais dans l'ensemble c'était pas mal.

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    Nous avons mangé des crêpes avec du caramel au beurre salé et bu du cidre. Nous étions aux anges et le nonce était ravi de manger autre chose que de la salade. Il a d'ailleurs demandé à son secrétaire de nous demander la recette.

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    Nous avons pris rendez-vous pour une visite du dispensaire mais il ne veut pas une visite trop officielle.


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  • Une journée qui commence par une urgence pendant la louange est une mauvaise journée mais une journée qui commence par deux urgences pendant la louange n'est pas forcement une mauvaise journée.

    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>

    Ce matin il fallait sortir les fauteuils du pick-up, comme d'habitude j'ai fait appelle aux gardiens.

    -Tu peux sortir les fauteuils du pick-up s'il te plait ?

    -...

    -Maintenant, avant que l'on se les fasse voler.

    -Ils sont pour nous les fauteuils ?

    -Non, ils sont pour la maternité pour que les mamans puissent allaiter.

    -Alors, je ne les sors pas.

    -Tu rigoles !!

    -Non, si tu ne me donnes pas les fauteuils, je ne les sors pas.

    -Je crois que tu n'as pas bien compris, je ne te demandes pas ton avis...c'est un ordre.

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    Dix minutes après, la première urgence. Ana n'était pas là et l'interne non plus. Marie m'a regardée interrogative.

    -C'est quoi ?

    -Je ne sais pas, un palud.

    -Bon, on l'envoie à l'hôpital alors ?

    -Mets lui un peu de Quinine, ça ne fera pas de mal.

    Le temps de mouiller le pagne de la petite fille pour faire baisser la température et Abdoulaye un de nos gardiens a déboulé dans la sale

    -Ma femme est à la maternité, il faut que tu viennes d'urgence.

    -J'arrive

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    J'ai traversé le dispensaire en courant tout en répondant au téléphone, mon père voulait savoir comment j'allais. « J'ai deux urgence sur les bras, je ne peux pas te parler. Je te rappelle »

    <o:p> </o:p>

    La femme d'Abdoulaye était couchée dans la salle de repos, sereine. J'ai compris que ce n'était pas elle qui n'allait pas bien mais la crevette née dans la nuit. Prématurée de 7 mois, 39 cm pour 1,650Kg. Elle était sous oxygène et la sage femme attendait un ordre pour la référée à l'hôpital.

    -Il faut la référée ?

    -Je ne sais pas, ce n'est pas moi la sage femme, c'est toi. Moi je suis juste responsable de la pharmacie.

    -C'est toi la responsable, c'est toi qui doit prendre la décision.

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    Je prends des décisions d'ordre médical presque tous les jours à la pharmacie pour des patients inconnus. Je remplace de  la chloroquine par du fansidar, j'accepte et je refuse les patients de notre programme d'épileptique, je décide du degrés d'urgence pour justifier l'octroie d'un médicament cher. Mais là c'était un bébé, c'était le bébé d'Abdoulaye.

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    -Si on lui retire l'oxygène il mourra ?

    -Je ne sais pas.

    -On peut le transporter avec l'oxygène jusqu'à l'hôpital ?

    -Non parce que s'il y a une autre urgence l'autre bébé mourra. On fait quoi ?

    -Laisse moi cinq minutes que je réfléchisse.

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    Il fallait que je réfléchisse, pour ne pas montrer que je panique souvent je fais le tour du dispensaire, ça m'aide. Au coin du bâtiment, je suis tombée sur Florence l'épouse de l'adjoint de la sécurité de l'ambassade de France. Elle est sage femme et vient nous aider bénévolement tous les mardi. Je lui ai demandé d'examiner le bébé pendant que je préparais le dossier de prise en charge avec le service nutrition, parce qu'en cas de prématurité « Terre des hommes »  (TDH) prend en charge gratuitement les frais d'hôpitaux de ces enfants.

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    -Dalassou, il vient ce papier ?

    -C'est Jalla qui le remplit.

    -Jalla, c'est pour aujourd'hui ou pour demain ?

    -Il faut qu'Awa mette le tampon, le tampon est dans le tiroir et c'est Delphine qui a la clé.

    -Et ben !!! J'espère que ce n'est pas une question de vie ou de mort parce que dans le cas contraire l'enfant doit déjà refroidir.

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    Vingt minutes plus tard, Florence m'a confirmée que l'enfant pouvait supporter le transport sans assistance respiratoire. Awa est enfin arrivée avec l'argent pour le taxi. Comme je n'ai pas eu le cœur de mettre la jeune mère et le prématuré dans un taxi collectif, je les ai fais accompagner par un gardien dans notre voiture.

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    L'enfant et la mère on été accepté dans le service de néonatologie et les frais seront payés par « TDH », une bonne nouvelle.

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    Après ça, j'ai enfin pu commencer à travailler. J'ai appelé le Dr Dougo pour lui dire que j'aimerai que nous décalions notre rendez-vous de 12h à 15h. « Pas de problème, je vous attends ».

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    Quand je suis arrivée dans le centre de santé du Dr Dougo son collègue m'a demandé ce que je faisais là. Je lui ai répondu que j'avais rendez-vous et que j'allais récupérer mes vaccins.

    -Dr Dougo est à la supervision régionale.

    -Jusqu'à quelle heure ?

    -Il ne reviendra pas aujourd'hui. Je ne comprends pas pourquoi il vous a donné rendez-vous.

    -Moi non plus.

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    -Allo Dr Dougo. Je suis au rendez-vous.

    -Je suis absent, je suis à la supervision régionale.

    -J'avais remarqué, comment fait on ?

    -Je règle tout avec Camara et je vous appelle demain.

    -Très bien, à demain.

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    Vous avez remarqué, je ne suis pas trop énervée dans le gardien à refuser de bosser, j'ai fait de l'humour quand le personnel de la nutrition a mis des plombes pour référé une urgence et je n'ai même pas crié quand Dougo m'a posé son deuxième lapin.

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    Mon seul mouvement d'humeur a été contre notre vendeur de gants qui nous a revendu des gants volés au stock d'UNICEF. Le comptable m'a bien expliqué que je n'avais aucun moyen de le prouver et qu'il ne fallait pas que je m'énerve. Pourtant, je sais bien qu'ils appartiennent au stock d'UNICEF puisque le mois dernier l'UNICEF ne m'a pas donné toute ma dotation sous prétexte qu'il n'y avait plus de gants. J'ai eu beau expliquer à notre comptable que j'étais énervée parce qu'en achetant ces gants nous alimentions le système et qu'il était hors de question de faire du recèle, il ne comprenait pas.

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    Finalement, je ne suis pas totalement irrécupérable mais je suis plus pessimiste pour le pays.

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